Bouc émissaire

C'est la faute à l'Europe, diront certains, ou du moins à l'Euro. Et si c'était tout simplement la faute à Marianne et sa dette?

Criée

Sur la criée, un matin d'hiver. "Une clarification" clame-t-on à gauche. "Projet curieux" renchérit-on à droite. Cela "ne peut pas durer". L'air est éléctrique, l'énervement manifeste. Car voilà qu'un petit est venu pêcher dans les eaux des grands, au gré de la marée. A son étal, les curieux, les indécis, les déçus, les futés, les bonnes gens lasses de choisir entre la truite et le cabillaud ; les Français, quoi! Alors on dit à gauche que ce sont "ceux qui ne veulent pas choisir qui se portent sur lui". A droite, on dit que ça ne durera pas. Entre temps, chez le petit, enfin du choix, du nouveau ! C'est tout frais sur cet étal bien aéré, et c'est pêché dans nos eaux. Les gens comprennent sans qu'on leur explique.

Gentleman Farmer

Le Béarn? Où? La France serait une île, nous dit Bruno Frappat et, fidèle au feu Général, "entendrait le rester". l'Ile de France, contrairement à ce que nous aimons croire, cela se réduit à peu de choses. Nous avons tendance à oublier que la grande majorité des français, c'est précisément les ouvriers, les agriculteurs, les habitants des banlieues, les petits employés. Alors, un "paysan lettré" pour président? Qui nous rassemble? Précisément parce qu'il nous ressemble. Et c'est peut-être bien cela qui dérange le plus : tout le monde n'aime pas se regarder dans un miroir.

Exception

Ce matin, dans un brillant petit billet, Bruno Frappat sonne l'alerte : Insularité! Et pourtant, au dire de Thomas Merton, "no man is an island". Mais l'exception française confirme la règle. Si le Français est encore un monsieur décoré, qui sort d'une grande école et qui ne sait pas la géographie, peut-être serait-il temps de nous souvenir d'une autre exception : Jean Monnet. Car attention, l'insularité peut conduire à l'asphyxie.

ancien régime

Alexis de Tocqueville, "L'ancien régime et la Révolution" - voilà de quoi alimenter vos lectures d'ici les présidentielles. On s'en doutait, on le savait même - après la lecture on se le sera redit : les problèmes actuels de la France, cette "vieille Marquise au passé glorieux" (El Païs), nous viennent "d'un grand nombre de lois et d'habitudes politiques de l'ancien régime" que nous avons oublié de déssoucher. Dans ce courant d'idées, je pense à François Bayrou qui nous a engagé, il y a quelques jours, à sortir de la "préhistoire" en dépassant le clivage gauche droite. Bayrou doit forcément penser à nos voisins d'Outre-Rhin où les coalitions, si elles ne sont toujours heureuses, ont du moins le mérite d'opter pour un certain pragmatisme. Seulement voilà : la Vieille Marquise, elle, n'est pas encore prête à enterrer son plus cher aïeul - la société de classe -, et à léguer ses habillements très dix-neuvième au musée Grevin. Aller au-delà du clivage gauche droite, c'est d'abord arriver à lâcher nos réflexes "ancien régime" si ancrés dans nos mentalités. Dixit M. de Tocqueville en exposant les grande lignes de son étude :

j'étais convaincu qu'à leur insu [les Français] avaient retenu de l'ancien régime la plupart des sentiments, des habitudes, des idées même à l'aide desquelles ils avaient conduit la Révolution qui le détruisit et que, sans le vouloir, ils s'étaient servis de ses débris pour construire l'édifice de la société nouvelle. . . [Dans les archives de l'administration publique], jai trouvé l'ancien régime tout vivant, ses idées, ses passions, ses préjugés, ses pratiques.

N'en somme-nous pas encore là?